Bonsoir,
Je suis yoga thérapeute et je suis spécialisée dans la santé du dos et notamment les scolioses. Mon ostéophate ( moi aussi j’ai une scoliose) m’envoie souvent des patientes avec scolioses, mais cette fois la personne a aussi le syndrome de Loeys-Dietz. J’avoue que c’est la première fois que j’entends parler de cette maladie. j’ai fait beaucoup de recherches ! Demain , c’est ma première séance avec cette dame, donc plutôt un entretien, une observation et une séance de base très douce pour évaluer ses capacités… mais par la suite, je me demande comment travailler avec cette personne, car j’ai l’impression que l’hypermobilité due à sa maladie va être un grand frein pour moi dans ce que je lui pourrais lui proposer par rapport à sa scoliose…Je suis un peu perdue ! J’appréhende. Je ne veux pas qu’elle ait mal ou se blesse sous ma guidance. Je me demande même si le yoga, aussi adapté qu’il soit dans ce cadre, est vraiment ce qu’il lui faut… Help ? Par avance, merci beaucoup !
Bonjour, il faudrait travailler du renforcement avant tout.
Qu’est-ce que le syndrome de Loeys-Dietz?
Le syndrome de Loeys-Dietz (SLD) est une maladie génétique rare qui affecte le tissu conjonctif du corps. Ce syndrome a été décrit pour la première fois en 2005.
Les personnes atteintes du syndrome de Loeys-Dietz présentent une variété de caractéristiques pathologiques au niveau des systèmes cardiovasculaire, musculo-squelettique, cutané (peau), immunitaire et gastro-intestinal. Ces manifestations pathologiques du SLD varient d’une personne à l’autre, avec des combinaisons de présentation allant de légères à graves.
Les personnes atteintes du syndrome de Loeys-Dietz développent souvent des problèmes gastro-intestinaux, notamment des allergies alimentaires, maladies gastro-intestinales, constipation et maladies inflammatoires de l’intestin (colite ulcéreuse et maladie de Crohn).
Je ne connaissais pas ce syndrome non plus. Dans ce genre de cas, je pense qu’il est important
- de ne pas projeter : tu accompagnes une personne et pas sa pathologie, qui en outre a une grande variabilité clinique. Donc tu ne peux pas savoir à quoi t’attendre ! et tu peux imaginer une hypermobilité là où la douleur aura installé plus de raideur …
- donc lors de ta séance, observe ce que tu as, cherche une pépite et vois ce que tu peux proposer
- dans mon expérience, les patients atteints de maladie très rares sont conscients que tu n’as pas de référentiels => ils sont très compréhensifs avec le genre de discours : « voyons ce que nous allons pouvoir faire ensemble. Nous ajusterons à chaque séance suite à votre retour » et ils sont très ouverts (voire rassurés par) à ce discours où l’on coconstruit des séances.
Donc fais toi confiance. Je ne sais pas si le yoga sera sa solution, mais il est important d’essayer et elle est entre de bonnes mains !
Tiens nous au courant !
Merci beaucoup pour ta réponse Muriel !
J’ai rencontré cette dame hier et outre sa grande résilience et tous les aspects emotionnels qu’elle a bien voulu partager avec moi lors de notre entretien, sur le plan physique voici le résultat de mes observations et de sa façon de se mouvoir dans les quelques poses proposées :
Sa pratique actuelle du yoga est régulière (ce qui est très positif), mais elle semble plus orientée autour de la notion de « ce qui est bon pour moi » que du plaisir ou de l’incarnation. Elle saute souvent la respiration et la relaxation, et se concentre surtout sur la mobilité et les étirements, ce qui ne lui est pas toujours bénéfique je pense car elle est très mobile…
Elle perçoit parfois son corps comme fragile — mais sans rancœur. Plutôt une forme de déception silencieuse, une certaine distance corporelle.
D’un point de vue structurel et postural, voici ce que j’ai observé :
- Une légère scoliose, probablement liée à son syndrome de Loeys-Dietz, avec une courbure lombaire gauche discrète et une compensation thoracique droite.
- Une pronation des deux pieds, avec des hallux valgus marqués (plus à gauche), et un pied gauche qui tourne légèrement vers l’intérieur.
- Un report du poids sur la jambe droite, avec une hanche gauche plus haute et plus fermée. La cuisse droite semble plus avancée, ce qui suggère peut-être une bascule antérieure du bassin de ce côté.
Ce que je compte lui proposer, si elle souhaite qu’on travaille ensemble :
Je sais qu’elle ne souhaite pas s’engager dans un protocole long ou rigide. Mon idée est donc de l’accompagner de manière ciblée, sans pression, en partant de sa routine actuelle (notamment le yoga), pour l’aider à se sentir plus en sécurité, plus forte, et plus connectée à son corps.
Voici les axes que je voudrais explorer avec elle :
1. Revoir les postures qu’elle pratique déjà
Des postures classiques comme le chien tête en bas, le pigeon ou les flexions avant, telles qu’on les retrouve dans Yoga with Adriene. Je souhaite l’aider à comprendre ce qui se passe dans ses articulations et tissus conjonctifs, pour éviter les sursollicitations silencieuses ou l’instabilité, même en l’absence de douleur, qui est à ce jour son seul « red flag »! si ça ne fait pas mal, elle y va !
2. Développer une conscience de son hypermobilité
Elle a une grande amplitude articulaire, mais cela ne signifie pas que tout est sécurisant. Les articulations ont peu de terminaisons nerveuses, donc les signaux d’alerte ne sont pas toujours perceptibles. Je veux l’aider à explorer ses vraies limites et à retrouver une sensation de sécurité dans le mouvement.
3. Améliorer la stabilité articulaire et la fonction à long terme
À travers des mouvements petits mais précis, on activera les muscles stabilisateurs profonds (hanches, colonne, épaules). L’idée est de renforcer les fondations pour qu’elle puisse rester active tout en protégeant son corps.
4. Comprendre l’impact de la posture sur ses douleurs
Croiser les jambes, s’avachir, jardiner toujours dans la même position… toutes ces habitudes influencent les hanches, le dos, les genoux, les pieds. Ce n’est ni bien ni mal, mais je souhaite l’aider à mieux comprendre ces effets pour réduire l’usure et retrouver un meilleur équilibre.
5. Soutenir sa passion pour le jardinage
Il n’est pas question qu’elle arrête — c’est trop important pour elle. Mon objectif est de lui proposer des outils pour mieux préparer son corps, doser son effort, et mieux récupérer, afin d’éviter que le jardinage ne la mette « hors service » pendant plusieurs jours.
6. L’aider à expérimenter des outils qu’elle connaît déjà mais qu’elle n’utilise pas vraiment
En tant que psychologue, elle connaît très bien les bénéfices de la pleine conscience, de la respiration, de la régulation du système nerveux… et les recommande sûrement à ses patient·es.
Mais dans son cas, ce n’est pas une question de connaissances. Il s’agit plutôt de créer un espace où elle puisse vivre ces outils par elle-même, de manière simple, concrète, et peut-être même agréable. Pas de longues méditations ni d’exercices respiratoires interminables — juste des pratiques de 3 à 5 minutes qu’on testera ensemble pour aider son système à redescendre en pression, surtout après une journée de jardinage ou de travail.
Voilà ce sur quoi je compte baser mon protocole de suivi :-)) Elle a repris RDV pour la semaine prochaine.
Top, heureuse pour toi ! Merci pour ton retour. J’ajoute aussi une notion, souvent rappelée dans ce groupe par Nelly qui a une scoliose majeure. Quand elle pratique le yoga, elle n’attend pas que le prof la rééduque. Elle veut pratiquer le yoga ! Donc (je le dis surtout pour nos lecteurs) il est important de clarifier ce point : qu’attend-elle de sa pratique avec sa toi?